
L’islam, du Rhin à l’Euphrate
“(…) Si la république de Weimar (1918-1933) n’avait montré aucune hostilité à l’égard de l’islam – bien au contraire, puisque dans les années 20, une mosquée et un institut islamique doté d’une école pour enfants avaient été in- augurés à Berlin -, le Troisième Reich (1933-1945) va reprendre à son compte la “politique musulmane” de Guillaume II, quoi que cette fois avec de nouveaux alliés : certains mouvements nationalistes arabes, plutôt que les Ottomans disparus de la scène. Hitler n’hésite ainsi pas à mettre en veilleuse ses théories raciales sur l’infériorité supposée des peuples arabes pour s’y gagner de nouveaux alliés et va jusqu’à affirmer que “les peuples de l’islam nous seront toujours plus proches que la France, par exemple, en dépit de la parenté du sang qui coule dans nos veines.” Et après une visite semble-t-il chaleureuse de l’émissaire du roi Ibn Sa’ūd qui lui avait évoqué l’hypothèse uchronique d’une défaite de Charles Martel à Poitiers, le Führer s’était pris à refaire l’Histoire : “Si les Arabes avaient gagné la bataille, le monde entier serait aujourd’hui mahométan. Les Allemands auraient été convertis à une religion qui croit en la propagation de la foi par l’épée et en la soumission de toutes les nations à cette foi… Une telle croyance était parfaitement adaptée au tempérament germain ! Les conquérants n’auraient guère pu se maintenir contre des indigènes plus vigoureux et habitués à la rudesse de cette nature où ils avaient grandi, de sorte que, pour finir, ce ne sont pas les Arabes mais les Germains, convertis à la foi mahométane, qui auraient été à la tête de cet empire islamique mondial.” Dans la filiation de Nietzsche, dont il est un lecteur assidu, Hitler semble particulièrement admirer la virilité guerrière, parfois fantasmée, de l’islam, cette “religion qui récompense l’héroïsme et promet au guerrier les joies du septième ciel”; son bras droit Heinrich Himmler, plus hostile encore au christianisme qu’il veut éradiquer pour faire renaître un culte païen en Allemagne, cultive la même vision romantique de la foi de Muhammad (pssl), “cette religion sympathique et pratique” qui “favorise les soldats intrépides.”
(…) Amīn al- Ḥusaynī, de son côté, ne mâche pas ses efforts pour gagner ses frères de religion à la cause du Reich, d’autant qu’il est rémunéré une petite fortune par le régime nazi – cinquante mille marks mensuels, soit le double de la solde d’un maréchal allemand. Fin 1942 (1361H), il préside ainsi à l’ouverture d’un Islamisches Zentralinstitut à Berlin, où il exhorte ses partisans à se dresser contre les ennemis des musulmans – “Juifs, bolcheviks et AngloSaxons” -, tandis qu’il multiplie les émissions en langue arabe sur Radio Berlin, supervise opérations de sab- otage et parachutage d’agents en Palestine ou encore établit un vaste réseau d’espion- nage en Tunisie et en Libye pour accom- pagner le débarquement du célèbre Afrikakorps du général Rommel. Surtout, c’est à l’instigation d’al-Ḥusaynī que vont naître les plus célèbres unités musulmanes de la Wehrmacht, l’armée régulière alle- mande, et de la Waffen-SS, corps d’élite nazi mené par Heinrich Himmler, qui n’a jamais caché son intérêt pour l’enrôlement de coreligionnaires du mufti au sein de sa machine de guerre. La 13ème Division de Montagne de la Waffen-SS “Handschar” – du nom du cimeterre ottoman – est le laboratoire de cette nouvelle filière de re- crutement du Reich pour laquelle de nom- breuses dérogations ont dû être accordées. Essentiellement composée de musulmans slaves de Bosnie, à qui Himmler a pour l’occasion inventé une origine gothique en les qualifiant de “germano-musulmans”, encadrée par des imâms dans un corps où la religion est normalement proscrite, ses membres arborent un traditionnel fez orné d’une tête de mort et un uniforme où le sabre turc a remplacé les runes païennes coutumières de la SS. (…)”
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L'alchimie, par Aissam Aït Yahya

Des Amériques à l'islam
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